L'inceste, la honte et la libération dans "Le jeune homme" d'Annie Ernaux
En explorant "Le jeune homme", nous sommes confrontés à un questionnement central : qu'est-ce qui distingue une psychanalyse d'un travail analytique écrit? Qu'est-ce qui, dans un écrit de ce type, peut avoir des effets d'analyse? À travers la trajectoire d'Ernaux, nous trouvons des pistes de réponses.
Ernaux utilise son texte comme un moyen de retraverser son passé, de le ramasser et de le traiter. Le jeune homme, avec ses expressions et ses manières de prolétaire, lui rappelle son père. Cela la conduit à revisiter sa jeunesse, son mariage, sa pauvreté et son avortement. Elle traverse ces épreuves en les écrivant.
Il y a une intertextualité dans son travail, un livre dans le livre, où chaque souvenir revécu est comme un noeud qui se dénoue. Le jeune homme est à la fois le véhicule de cette exploration et le révélateur de la question de l'inceste, en raison de sa ressemblance avec son fils.
Le regard des autres, leur jugement présumé, renforce cette dimension de l'inceste. Ernaux souligne la double mesure de la société : une femme âgée avec un homme jeune est jugée, tandis qu'un homme âgé avec une femme jeune n'est pas stigmatisé. Ce décalage est une composante essentielle de la honte qu'elle ressent.
Mais l'histoire d'Ernaux avec ce jeune homme est plus qu'une relation tabou. C'est un moyen pour elle de se défaire de sa condition, qu'elle soit bourgeoise ou prolétaire. Elle choisit un homme qui reflète son propre passé, et par là même, transcende sa propre honte.
Enfin, cette relation marque un franchissement, une séparation. Quelque chose de fondamental change. Ernaux se libère de la honte qui l'a entravée pendant si longtemps.
"Le jeune homme" témoigne de l'efficacité de l'écriture en tant qu'outil analytique. Malgré ses réticences envers la psychanalyse, Ernaux se retrouve en plein dans le dispositif. Elle démontre la fonction de traitement de l'écriture.
L'association pénélope, avec le soutien bénévole de Viviane Galy (Psychanalyste)